jeudi 10 avril 2014

Remaniement : un bras d’honneur aux électeurs

9 AVRIL 2014 par THIEULLOY (DE) GUILLAUME dans POLITIQUE avec 0 COMMENTAIRE

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le remaniement ministériel opéré par Fran­çois Hollande est un bras d’honneur aux électeurs (je n’ose pas dire une quenelle, sachant les liens étroits entre le nouveau Premier ministre et l’humoriste Dieudonné M’Bala M’Bala, inventeur de ladite « quenelle…).
Oser dire qu’il a entendu le message et nommer ce gouvernement est se moquer du monde.
Car, s’il y a une chose qui saute aux yeux, c’est que rien ne change : tous les postes importants sont occupés par des personnes qui occupaient des postes importants dans le gouvernement Ayrault (souvent les mêmes d’ailleurs).
Au demeurant, Manuel Valls, le nouveau Premier ministre, a placé son action sous le signe de la continuité et de l’efficacité (ce dernier point n’est guère aimable pour son prédécesseur !). Continuité, qu’est-ce que cela signifie, sinon que la direction suicidaire imposée à notre pays ne sera pas modifiée ?
Il y avait deux façons d’interpréter le résultat des municipales : soit les Français avaient clamé dans les urnes leur refus
du socialisme, soit ils avaient réclamé un tournant à gauche. Dans un cas, il fallait un gouvernement d’ouverture au centre et à droite ; dans l’autre, un gouvernement d’alliance avec l’extrême gauche. Mais cette façon de ne pas choisir, de garder un pied dans le socialisme orthodoxe et un autre dans la social-démocratie est le pire choix que le président pouvait faire. Toujours son goût de la synthèse radical-socialiste…
Au moins est-il clair que François Hollande fait la politique du PS et ne cherche pas à séduire les électeurs qui ne sont pas d’accord avec lui. Peut-être cela pourra-t-il donner des idées à d’éventuels futurs chefs de la droite… Il n’y a guère qu’à droite, en effet, que l’on ait l’idée loufoque de se faire élire sur un programme et d’appeler au gouvernement des adversaires de ce programme pour (ne pas) le mettre en œuvre !
S’agissant du gouvernement Valls, à part le fantastique bras d’honneur aux électeurs, je retiens trois importants motifs d’inquiétude.
Tout d’abord, l’attelage à Bercy est encore moins cohérent que précédemment (ce qui n’est pas peu dire). Dire, comme on l’a entendu ces derniers jours, que Bercy serait désormais, en quelque sorte, co-dirigé par Michel Sapin, pour la rigueur, et Arnaud Montebourg, pour la croissance, est grotesque.
Il faut choisir. Soit on considère que le principal problème de la France est sa crédibilité comme débiteur et l’on commence à rembourser, donc à tailler dans le gras de l’État-providence. Soit on croit possible de relancer la croissance par l’investissement public, et l’on remet à plus tard l’équilibre budgétaire. Mais on ne peut pas tenir les deux discours en même temps.
Deuxième source d’inquiétude : le maintien en poste de Christiane Taubira. Comme cette femme n’est pas de celles qui s’accrochent à leur maroquin à tout prix, il est clair qu’elle est restée à ses conditions. Ce qui me laisse craindre qu’elle soit fermement décidée à faire voter sa nouvelle loi Taubira, sur la réforme pénale. Ainsi, non seulement nous allons être tondus par l’impôt, mais, en plus, livrés à des délinquants que l’État aura désormais mission de protéger et non plus de neutraliser.
On peut certes espérer le contraire, puisque son principal adversaire dans la majorité sur ce sujet est désormais Premier ministre. Mais je ne vois pas comment Christiane Taubira accepterait d’en rabattre sur son programme, qui reste de mettre la justice française au service d’une espèce de conception archaïque de la lutte des classes.
Enfin, ma dernière inquiétude tient à Manuel Valls lui-même. Je n’oublie pas qu’il fut l’un des rares élus locaux PS à tenir compte de la réalité, à proposer de revenir sur les 35 heures, ou à comprendre le problème de l’insécurité. Mais je n’oublie pas non plus son bilan désastreux comme ministre de l’Intérieur…
Et, surtout, je constate que sa seule façon, pour obtenir le soutien de la désormais très courte majorité de socialiste à l’Assemblée, est de donner des gages. Or, les seuls qui soient possibles, sans modifier radicalement son image (entreprise trop lente et trop périlleuse pour qu’il puisse s’y risquer) tiennent aux limitations des libertés publiques – en particulier sur internet, bête noire des socialistes.
Il y a tout lieu de croire que c’est contre les honnêtes gens, et tout spécialement contre nos libertés, que ce « gouvernement de combat » va agir. Nos libertés ont déjà rétréci comme peau de chagrin. Que M. Valls et ses amis ne comptent pas sur nous pour nous laisser faire sans réagir !
Guillaume de Thieulloy

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